Voici le récit du marathon de Liège, effectué par un grand rameur belge:
51ème Marathon International de LIEGE organisé par le RSNM
Samedi, 18 octobre 2008
Les pieds dans la Meuse !
L’année passée, à l’occasion du 50ème, Gilles Bouvet (RSNM) commentait sur la chaîne TV locale que pour faire un marathon, il faut « savoir s’entraîner, être combatif et savoir souffrir ». Dans cette épure, Marc Olynyk et Jean-Marc Liard m’accompagnent à bord de la triplette Empacher des années 70, fidèlement rénovée il y a deux ans; structure solide et confortable en frêne et mélèze, toute verte revêtue, glissante à souhait, stable, maniable et pourvue de mâcons en bois. Incertains quant à son poids, nous nous rendons à la pesé orchestrée par Jean-Pierre Balfroid (RSNM) qui nous annonce « 85kg !». Transférée ainsi dans la catégorie des plus de 70 kg, l’équipe gagne 5 minutes sur l’heure de départ.
Sous un ciel azuré idéal, les premiers marathoniens rament déjà depuis deux heures et demie quand à 13H08 le signal de notre départ retentit au loin. La triplette fuse au soleil éclatant. De petites vagues clapotent sur la coque, le temps d’une descente éclair. Après un tournant efficace au pont Atlas, nous remontons aisément la dérivation abritée du clapot mosan.
La deuxième boucle nous réserve, quant à elle, quelques surprises. A peine avons-nous passé le môle, que nous croisons à bâbord une barge gigantesque propulsée par le « Li Torê », nous retrouvant nez-à-nez avec la police fluviale qui nous esquive in extremis pour s’intercaler entre notre frêle embarcation et ce mastodonte. Les vagues dévastatrices submergent facilement la triplette, non pontée et basse, qui emmagasine, le temps d’un blitz, des dizaines de litres. L’équipe n’est pas synchrone et mes « ensembles ! » meurent dans le bruissement des flots tumultueux. D’autres péniches et yachts, remontant à vitesse non réduite, génèrent des vagues puis contre-vagues répliquées avec force par les berges. Nous les percutons de plein fouet tel un surfboat explosant des vagues océanes. Les gaufres au sucre de Marc flottent insouciantes dans la triplette qui pèse maintenant 400 kg; la remontée est sportive! In fine, nous vidons notre bateau à l‘Union.
De retour sur la Meuse agitée, le bateau fluctue au rythme fou des pointes et creux inopinés; impuissants, nous embarquons une myriade de flots! Nous voilà déjà obligés d’accoster prématurément au Sport Nautique, juste après le Genève, mixte UNL/TORONTO dirigée par Michèle Jadot et dont l’un des moteurs puissants n’est autre que Michael Mc. Namara. Nous vidons la triplette plus rapidement et reprenons la Meuse en premier. Plus en aval, nous passons le pont St Léonard, rejoignant cinq, six bateaux désemparés par les flots tumultueux. Avec le poids de l’eau, la triplette devient incontrôlable. Elle part subrepticement dans tous les sens au gré des vagues et contre-vagues, mais nous tenons bons. Sur un coup de poker, nous fendons les déferlantes et passons ce groupe de quelques embarcations qui s’attardent à se mettre parallèles aux vagues. La remontée se fait inexorablement les pieds dans l’eau. Gaufres, bouteilles, gants se baladent à bord, l’air de rien ! Nous amarrons avec délivrance à l’Union. Au moment de vider le bateau, un siège tombe par mégarde. Benjamin Schmetz le ramasse! Nous faisons l’accolade à Eric Lapierre qui nous encourage. Reprenant place à bord, nous voyons passer le Genève et les bateaux précédemment remontés. Délestée de 50 litres, la triplette repart de plus belle.
Mains en feu, fesses en bois ! Les efforts fournis pour affronter les flots déchaînés par le trafic fluvial nous laissent présager un quatrième tour lancinant. Plus techniques, nous ramons à bonne allure. Connaissant le parcours, j’ai le pressentiment que nous fonçons aveugles sur la pile du pont des Arches ! Je me retourne pour apprécier la situation et, la vista salutaire, signale illico d’affaler à tribord, évitant le pire. Peu après, Marc nous annonce que les visses de sa planche de pieds sont parties faire un tour. A Atlas, on aperçoit la mixte dynamique 5x du Sport/Union avec Hélène Garsou. Marc fouillant dans l’eau trouble, retrouve enfin ses visses avant de les serrer prestement. La remontée sera jalonnée de mini courses… Nous voilà en prise directe avec le double UNL fulgurant de Xavier Dupont et Vincent Marechal, portés par les exhortations de Michel Orban, à bicyclette, qui lance équitablement « Allez l’Union ! ». Nous ramons côte à côte un laps de temps avant que le double canoë flambant neuf, file vers la quatrième place! Par après, au bout du môle, nous dépassons un double scull de l’Union, à bord duquel deux vieux compères exténués, Vincent Nys amorphe et Michel Grégoire gagné par le froid, sont sur le point d’abandonner.
Nous abordons l’ultime tour avec le double scull burn-out en ligne de mire qui nous suit tant bien que mal. La descente est épique, la remonté héroïque, principalement pour Jean-Marc qui s’arrête de ramer, le temps de ravigoter ses jambes « bleues de contractures». Arrivés dans le dernier tournant avant le parc de la Boverie, nous nous voyons remontés à tribord, par un quatre de course barré, composé de Jean-Marie et son fils (CRB), Manu et Marc (3Y) ainsi que Laurent (RCAE) terminant vaillamment leur 7ème tour. En même temps, à bâbord, arrive un double canoë tiré en force par deux débutants motivés de l’UNL, à savoir Romain Struman et Samuel Eskenazi. Pris en étau, nous décidons d’affaler pour les laisser passer sans encombre! De profundis, nous entendons les cris douloureux de Romain, qui brûle ses dernières forces. Depuis le pont des Vennes, Anne-Marie Gobe nous soutient. De même, à hauteur de l’Union, Florence Libois, arrivée depuis belle lurette à la 16ème place, nous supporte avec enthousiasme. Un peu plus loin sur les berges de la Meuse, les encouragements comiques de deux frères de rame, Fulvio Fortunato et Michel Haagmans, arrivés depuis 30 minutes, nous transportent jusqu’à l’arrivée.
A la remise des prix, nous sommes tous contents et fiers d’avoir achevé cette épreuve; sans doute, la plus belle de l’année, récompensée par une symbolique petite assiette en étain. Bravo spécial au skiffeur de choc, Jean Somers, vainqueur du marathon 7 tours, à la prometteuse Pauline Vito, deuxième du 4 tours (en double scull avec Maïlis Olbregts de l’UNB) et au champion, Vincent Perot, deuxième du 5 tours (en double scull avec Gilles Poysat du RCAE). Quant aux bateaux allemands venus en nombre, ils occupent la première place des 4 tours et des 5 tours ainsi que d’autres bonnes positions habituelles au classement général. Parmi les mises à l’honneur, bravo au légendaire André Teller qui signe dignement son 25ème marathon, à Pierre Marly récompensé d’une pelle en bronze pour son 20ème, au duo performant d’Huguette Halleux et Myriam Lecrenier honorant leur 10ème ainsi qu’aux « incroyables mais vrais » Michel Haagmans et Christiane Lecrenier qui savourent joyeusement leur 15ème au resto autour d’un Méchoui, avec une vingtaine de rameurs et rameuses des trois clubs liégeois et de l’ « UNL français », à savoir l’Union Nautique de Lille !
Frédéric Meurant
Marathon de Liège le 18 octobre 2008
Modérateur : steph